MAD MAX FURY ROAD de George Miller

Attention spoilers ! Il est préférable d'avoir vu le film avant de lire ce post.

Bon, pour couper court : est-ce que Mad Max 4 est un bon film ? oui ! Est-ce que Mad Max 4 est un très bon film ? Oui ! Est-ce que Mad Max 4 est aussi démesuré que prévu ? Oui ! Est-ce que Mad Max est le chef d’œuvre annoncé?.... Aussi, mais pas que... !
Attendu comme le nouveau maitre étalon du cinéma d'action, voir comme une révolution cinématographique moderne, "Mad Max Fury Road" contient indéniablement tous les éléments que Warner nous vend à travers de nombreux spots et trailers ainsi que dans les articles publiés un peu partout : le retour du film post-apocalyptique par le maitre du genre, le bruit et la fureur d'une course-poursuite monumentale de quasiment 2 heures, des hordes barbares déchainées, et une violence et une sauvagerie bruts de décoffrage qui se font bien rares en ces temps de blockbusters policés pour plaire au plus grand nombre.
Le film est effectivement un gigantesque grand-huit et une énorme tempête d'énergie mise sur pellicule, ou l'action commence dès les premières images pour ne plus s'arrêter.
Après avoir tenté en vain d'échapper aux hommes d'Immortan Joe, leader d'une communauté de barbares asservissants les quelques rares survivants d'une humanité post-apocalyptique, Max est fait prisonnier et sert de réserve de sang; mais lorsque le bras droit de d'Immortan Joe, l'Imperator Furiosa, s'enfuit à bord d'un camion avec ses 5 esclaves sexuelles et mères porteuses, celui-ci lance ses troupes à leur poursuite. Max parvient à s'évader et va tenter d'aider Furiosa dans sa fuite.
Miller retrouve ici le style cinématographique qu'il a développé dans ses précédents films, dont  des plans tournés à ras le bitume sur des routes désertiques, un montage foudroyant d'énergie, et de légères accélérations de défilement de pellicule pour dynamiser encore plus ses scènes d'action. Oui, le réalisateur revient au bases stylistiques de son style, et ça lui va bien ! On peut même dire qu'à 70 ans il pète carrément la forme, et retrouve ici une vaillance et une détermination qu'il n'avait plus démontré depuis de nombreuses années, et qui nous manquaient vraiment. A ceux qui pensaient avoir déjà tout vu sur un écran de cinéma, il décide de prouver le contraire, et propose un spectacle furieux, barbare et énervé sans égal...
Le seul point de réel discussion pourrait être la place laissée à son personnage principal, et qui a eu du coup un impact énorme lors du visionnage du film : Max n'est pas selon moi le héros du film ! Il y a bien sur une place prépondérante, mais pour moi, Miller s’intéresse bien plus à Furiosa. Est-ce pour cela qu'il a choisi Tom Hardy pour prendre la relève de Mel Gibson ? Hardy est un très bon comédien, mais son charisme et son jeu sont bien loin de pouvoir rivaliser avec ceux de Gibson; de plus, je trouve qu'il a peu a jouer, si on compare son rôle à Furiosa ou Nux, le guerrier frappé du ciboulot formidablement interpreté par Nicholas Hoult. Et alors qu'Hardy volait régulièrement la vedette à ses partenaires récents, c'est à son tour de se faire bouffer : Charlize Theron cannibalise, mais ce n'est pas négatif, complètement le film, et démontre dans son jeu et dans ses capacités physiques qu'elle peut être l'égal de la plupart des acteurs d'actionner bourrin sur le marché. Depuis combien de temps n'avait-on pas vu une héroïne de film d'action, qui plus est aussi fonceuse et déterminée ?!?!
Il me semble que Miller savait que les fans des métrages précédents accepteraient difficilement un nouvel acteur dans le rôle-titre, et a préféré construire son film autour d'un binôme, peut-être afin de réduire  au maximum les risques de déceptions de la fan-base. Un choix judicieux à mon sens, qui permet d'élargir les possibilités en cas d'éventuelles séquelles (rien n'empêche Miller de tourner un prochain volet entièrement focalisé sur Furiosa), tout en relançant la franchise avec une nouvelle dynamique si le public adhère au choix Tom Hardy dans la peau de Max.
Et d'ailleurs, une question me taraude : Tom Hardy interprète-t-il réellement Max Rockatansky ? Certes on retrouve quelques éléments chers au héros inventé par George Miller : l'Interceptor qu'il conduisait précédemment, le harnais métallique qu'il porte à la jambe gauche, le blouson en cuir, le fusil à canon scié, la caractérisation quasi-mutique, le traumatisme de son drame familiale. Mais l'apparition de la petite boite à musique, donnée à l'enfant sauvage à la fin du deuxième film, ainsi que la volonté du héros à ne pas divulguer son nom, me pousse à croire qu'on est bien en présence du Ferald Kid, qui utilise le patronyme de son héros Max à la toute fin du film, une fois qu'il a accompli sa mission (identique à celle de Max  dans le 2ème film, les femmes remplaçant l'essence). Cela expliquerait aussi pourquoi Max n'a plus la même cool-attitude, celle qui nous faisait instantanément aimé le personnage. Il est désormais un vagabond sauvage, en proie à des visions cauchemardesques qui lui rappellent sa vie d'avant (et étrangement, il est hanté par une fillette visiblement décédée, alors que Max est censé avoir perdu un fils lors du premier chapitre), déshumanisé par des années d'errance afin d'échapper aux hordes de fous-furieux qui peuplent toujours les zones désertiques qu'il traverse à bord de son fidèle Interceptor.
Au delà de ces digressions, reste le spectacle lui-même, complètement allumé et jubilatoire, qui durant presque 1h45 assène des baffes allers-retours d'anthologie au spectateur, faisant passer la plupart des films d'action récents pour des pellicules atteintes d’arthrose et de d’arthrite ! Au cœur du désert namibien et donc dans des conditions qu'on imagine infernales, George Miller a tourné ni plus ni moins que la plus monumentale des courses-poursuites vues sur un écran de cinéma. Dans chaque plan se cache une cascade effrayante, démesurée et/ou dangereuse, le tout filmé avec une énergie communicative par un Miller énervé qui n'a plus les contraintes budgétaires qui l'avaient limité précédemment.
J'avais quelques craintes quand à une certaine redondance dans les séquences d'action (de combien de façons différentes peut-on filmer des voitures débordants de barbares suicidaires poursuivre un camion-citerne dans une looooongue ligne droite en plein désert ?), mais le réalisateur en a vraiment sous le pied, et a fait preuve d'une inventivité qui surpasse allègrement tout ce qui a été fait auparavant, que ce soit par lui ou ses successeurs !
George Miller s'est volontairement émancipé des us et coutumes hollywoodiennes pour renouveler un genre qu'il a bâti il y a de cela presque 35 ans, et remet les compteurs à zéro. "Mad Max Fury Road" ne renouvelle pas le genre; il le dynamite, le pulvérise, et sur ses décombres se réinvente !

Commentaires

Articles les plus consultés