DVD : ELECTRIC BOOGALOO de Mark Hartley


Énorme documentaire que ce "Electric Boogaloo : The Wild, Untold Story of Cannon Films" annoncé depuis une paire d'années et enfin distribué en DVD (ce mois-ci avec Mad Movies, et pour moins de 15€) ! La Cannon a marqué toute une génération de cinéphiles durant les années 80/90 avec son attitude décomplexée de studio indépendant, ses séries B et Z bordéliques mélangeant les genres les plus populaires avec un sens de l'opportunisme rarement égalé, et le ratage quasi systématique de toutes ses tentatives artistiques un tant soit peu honorables. C'est là presque un cas d'école : la Cannon foirait pratiquement tout ce qu'elle tentait, mais elle le faisait avec panache !
Forts de leurs succès locaux en Israël, les cousins Menahem Golan et Yoram Globus ont racheté la Cannon au tout début des années 80, et ont tenté de transformer cette petite maison de production et de distribution en un énorme studio indépendant capable de concurrencer les majors. Ils voulaient jouer dans la cour des grands sans en avoir ni les talents ni les moyens (même s'ils se donnaient des airs de multimillionnaires, leurs productions, à de rares exceptions, étaient généralement assez fauchées) mais en créant le buzz en engageant à prix d'or les plus grandes stars de l'époque, et en montant leurs projets à grands coups d'annonces et d'effets de manche. Face aux dirigeants des majors, généralement des avocats et de jeunes loups aux dents longues tout juste diplômés de grandes écoles de commerce, ils ont dégainé leur passion du cinéma, leurs envies "d'american dream", ainsi que leurs égos et ambitions démesurées. Et durant quelques années, ils ont effectivement été les rois d'Hollywood !

Le documentaire de Mark Hartley est vraiment bien foutu, et à l'aide des témoignages pas toujours tendres de dizaines d'acteurs, réalisateurs, producteurs et de collaborateurs qui ont œuvrés pour la Cannon, il conte la montée, l'apogée et la chute du studio. Molly Ringwald, Dolph Lundgren, Richard Chamberlain, Olivia d'Abo, Alex Winter, Catherine Mary Stewart, Franco Nero, Cassandra Peterson, Robert Forster, Tobe Hooper, Michael Dudikoff, Sybil Danning, Martine Beswick, Franco Zeffirelli, Albert Pyun, Barbet Schroeder, Avi Lerner, Gary Goddard, Mark Goldblatt, Sam Firstenberg, Luigi Cozzi, Just Jaeckin, Richard Edlund et Rusty Lemorande sont parmi les principaux protagonistes à partager leurs expériences au sein du studio. Certains souvenirs sont particulièrement savoureux, en particulier ceux de Bo Derek (toujours aussi canon !), Elliott Gould ou Laurene Landon (qui n'hésite pas à mettre le feu à sa copie VHS du film "America 3000" pour témoigner de son dégout d'avoir tourné pour Golan et Globus !).D'autres n'hésitent pas à balancer face caméra les méthodes parfois douteuses qu'ils employaient pour arriver à leur fin; manipulations, vols, insultes et autres arnaques financières, tel était le quotidien de Golan et Globus. Mais étaient-ils si différents de leurs concurrents? Pas sur, quand on voit la quantité d'écrits existants sur les moyens peux orthodoxes prisés depuis toujours dans la Mecque du cinéma. Eux le faisaient ouvertement et face à toute la profession, se moquant totalement des conséquences et des "qu'en dira-ton". Seul comptait la reconnaissance par la réussite financière.
Mais le réalisateur Mark Hartley ne fait pas que se moquer des 2 cousins, même si dans un premier temps il souligne à grand renfort d'extraits les ratages et autres bizarreries produites par la Cannon. Il démontre aussi la passion qui les animait et leurs tentatives de se sortir des séries B/Z qui avaient fait leur renommée, pour créer des œuvres différentes, populaires et artistiquement reconnues. Financer Zeffirelli, Konchalovsky, Jean-Luc Godard ou Jerry Schatzberg avec les montagnes de pognon récoltés par Chuck Norris, Jean-Claude Van Damme, Charles Bronson, Stallone et Michael Dudikoff, tel était aussi leur but dans la deuxième partie des années 80. Hélas, ces œuvres envisagées pour légitimer la place qu'ils souhaitaient occuper à Hollywood les a complétement coulé, et leur a fait mettre la clé sous la porte, à peine 10 ans après leur arrivée aux États-Unis.

Oui assurément, "Electric Boogaloo" est un excellent documentaire, qui retrace avec humour et énergie (parfois même un peu trop; le rythme ici est très soutenu et rapide, comme l'était déjà celui de "Not quite Hollywood", autre documentaire de Mark Hartley cette fois sur le cinéma d'exploitation australien) l'histoire de la Cannon, des cousins Golan/Globus, et de leur folle virée en terres hollywoodiennes.



Quelques visuels publicitaires de films, existant ou pas, de la Cannon :

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